L'Aventure de la cité ultime
Même sans consulter mes notes, je me souviens de cet hiver-là. À la mi-janvier, un froid sibérien s’installa sur Londres avec, semblait-il, l’intention de persister jusqu’à ce qu’ours polaires et loups des steppes viennent prendre leurs quartiers dans nos parcs. N’exerçant pas encore, je restais au coin du feu et me réjouissais de ne pas avoir à suivre Sherlock Holmes dans les rues polies par le verglas et récurées par le vent.
Pensée que je ne tardai pas à regretter.
Depuis deux semaines, Holmes installait chaque matin sa longue silhouette dans son fauteuil, devant la table du petit déjeuner, avalait une bouchée d’œufs au bacon et deux gorgées de café, puis lisait les journaux et les jetait loin de lui avec un soupir exaspéré.
Le grand détective avait tout arrangé autour de lui pour ne pas avoir à quitter le sofa sur lequel il gisait toute la journée, enveloppé dans sa robe de chambre gris souris avec la grâce d’un tas de chiffon abandonné. Sa blague à tabac était posée sur le sol, à sa portée ; sur le manteau de la cheminée, une petite fiole voisinait avec un étui de marocain. Les jours passaient sans qu’il m’adressât la parole autrement que par grognements et monosyllabes. Je voyais le désordre grandir autour du divan tel un chancre sur la chair d’un malade…
Caractéristiques
- Date de parution
- Éditeur
- Collection
- 01/01/2012